"L'ARCHITECTURE DU SILENCE" Mauritanie - 2012
''L'Architecture du Silence''
Après ''l'Architecture de l'Absence'' dans les chantiers de démantèlements au Bangladesh, c'est dans les eaux mauritaniennes que je vous convie avec ''l'Architecture du Silence''.
Je suis allée dans la baie de Cansado, là où les bateaux sont sabordés sciemment sans réglementation aucune. Cette baie est jonchée d'épaves que viennent découper des ferrailleurs; épaves qui, peu à peu, ne ressemblent plus à rien d'identifiable. N'en reste qu'un paysage métallique dessiné par des formes inquiétantes, émergeant de l'eau.
Je suis allée également au Cap Blanc non loin de là où s'est échoué '' La Méduse'' sur le banc d'arguin qui inspira le fameux tableau de Géricault.
J'y ai rencontré un grand bateau turc. Il était là, abandonné, silencieux, digne, ensablé sur la pointe du Cap Blanc. Un cap qui n'est plus tellement blanc, mais recouvert de détritus de toutes sortes, probablement largués par le dégazage incessant des bateaux au loin.
A l'horizon, s'échappant d'une concession de mine de fer, une épaisse fumée farineuse et orange dévorait lentement le ciel.
Partout, d'immenses bancs d'oiseaux. Les pattes dans le sable sale et boueux, ils se tenaient là debout, hagards et comme renfrognés.
J'éprouvais alors le triste paradoxe d'un monde sauvage envahi peu à
peu par une société urbaine et industrielle se développant sauvagement.
C'est ce paradoxe que je photographie. Froidement. Ces paysagesindustriels de l'abandon qui sont notre esthétique contemporaine.
Dans cette fureur, j'ai isolé un espace architecturale silencieux, suggéré par un vide laissé autour du bateaux qu'une lumière changeante selon les heures de la journée vient immanquablement nourrir.
Un espace visuel silencieux ou chacun peu projeter sa propre histoire.
Francesca Piqueras
Novembre 2011